Newsletter 6 – Fevrier 2014 – Une tuméfaction trompeuse…

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Newsletter 6 – Fevrier 2014 – Une tuméfaction trompeuse…

Un patient de 50 ans était adressé au centre pour une lésion de la gencive. Il ne présentait aucun antécédent médico-chirurgical et consommait 3 cigarettes par jour. Cette tuméfaction gingivale s’était installée progressivement depuis plusieurs mois de manière indolore.

L’examen clinique montrait un nodule entre les dents 43 et 44. La lésion avait une consistance ferme. La muqueuse de recouvrement était normale. Son exploration à l’aiguille confirmait son caractère « mou ». Les dents étaient vitales. Il n’existait pas de signe neurologique associé, ni d’adénopathie cervicale.

La radiographie panoramique ne montrait aucune lésion ostéolytique.

La lésion était cliniquement peu spécifique et évoquait principalement une tumeur conjonctive gingivale. Il était décidé de réaliser l’exérèse chirurgicale.

 

L’examen de la pièce opératoire concluait à un améloblastome folliculaire (AF).
Une tomodensitométrie (TDM) était alors prescrite et permettait de mettre en évidence cette ostéolyse multiloculaire. Il n’existait pas de résorption radiculaire des dents adjacentes qui restaient vivantes.

L’exérèse étant complète à l’examen anatomoptathologique et compte tenu de la petite taille de la lésion, la décision d’une surveillance était prise. Le patient était alors revu à M3.

En per-opératoire, il était noté une ostéolyse sous-jacente. Cette image, bien que discrète peut être discutée à postériori sur la radiographie panoramique…

Discussion

L’améloblastome (A) est la deuxième tumeur odontogénique par ordre de fréquence (1). Il se développe à tout âge avec une médiane entre 40 et 50 ans (2). Les 2 sexes sont touchés sans différence (5). L’étiologie est mal connue (5). La mandibule est touchée dans plus de 80% des cas (4). L’aspect clinique peut être une tuméfaction mais l’évolution exclusivement intra-osseuse dans 98% des cas fait que la découverte est le plus souvent fortuite (2). L’aspect radiographique est celui d’une lésion ostéolytique multiloculaire en « bulle de savon » dans 2/3 des cas (3). Il peut être uniloculaire. Le bilan radiographique associe une TDM au cliché panoramique (3). Dans notre cas, la lésion était pratiquement invisible à la radiographie panoramique et paraissait d’origine muqueuse. La TDM n’a donc pas été prescrite dans le bilan initial. Histologiquement, il existe plusieurs types d’améloblastomes: A solides multikystques folliculaires ou plexiformes, A extraosseux périphériques, A desmoplastiques, A unikystiques (1). Le diagnostic différentiel doit se faire avec les tumeurs bénignes et malignes des maxillaires (4) et de la muqueuse buccale comme le met en évidence notre cas.
Le traitement reste l’exérèse chirurgicale (5). Il peut s’agir comme dans notre cas d’une simple énucléation ou d’une exérèse large (2). Le suivi est essentiel car la récidive est fréquente, même à très long terme (1).

Bibliographie

1. Barnes L, J. E, Reichart P, Sidransky D, editors. WHO classification of Tumours: Pathology and genetics of head and neck tumours: IARC Press; 2005.
2. Améloblastomes des mâchoires. Analyse rétrospective de 1994 à 2007. B. Ruhin-Ponceta,b,*, A. Bouattourb, A. Picardb,c, P. Menarda, F. Caprond, J.-C. Bertranda. Rev Stomatol Chir Maxillofac 2011;112:269-279.
3. Améloblastome: diagnostic et traitement. A propos de 26 cas; Nitassi S, Bouladass M, Tobi I, Essakil L, Kzadri M. Med Buccale Chir Buccale 2009 ; 15 : 93-100.
4. Améloblastome : prise en charge par le médecin dentiste. Alaoui MO, El Bouihi R, Ben Yahya I. Med Buccale Chir Buccale 20120;18:221-227.
5.Unicystic ameloblastoma in children: systematic review of clinicopathological features and treatment outcomes. Seintou A, Martinelli-Kläy CP, Lombardi T. Int J Oral Maxillofac Surg. 2014 Feb 3.

 

Fabrice Campana
f.campana@centremassiliendelaface.com

Spécialiste en Chirurgie Orale
Docteur en Chirurgie Dentaire, Aix-Marseille 2000
Ancien Interne en Odontologie
Ancien Assistant Hospitalo-Universitaire

Attestation d’études approfondies en chirurgie dentaire, Bordeaux 2000
CES d’odontologie chirurgicale, Bordeaux 2002
Maîtrise de Sciences Biologiques et Médicales, Bordeaux 2001
DEA de Biologie orale et osteoarticulaire, biofonctionnalité et biomatériaux. Université Paris 5, Paris 7 2004

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